Une âme s'envole

Admin Messages : 7 Date d'inscription : 26/04/2009 Localisation : Courmayeur ?

[Quelque part dans les montagnes, aux environs d'une tombe...]

Il ne sait plus quand il est mort. Au-dessus de lui, l'azur, les nuages, des trous immenses de clarté et d'ombre dans le ciel. En bas, le sol, la poussière, le bruit de ses propres pas dans les herbes sèches. Dans sa tête, des mirages, une idée vague de bonheur. Une flamme aussi. Un joyau mal défini. L'amour ? Le vent, peut-être... L'effet des éléments sur son âme insatisfaite, fébrile.

L'amour, peut-être l'amour... Ou l'appel de la montagne. L'horizon, l'avenir, la mort. Comment savoir ? Il monte, ivre, le cœur tourmenté, la tête pleine de rêves étranges et suprêmes.

A présent il presse l'allure, hanté par ses feux. Et de plus en plus résolu, se dirige vers les brumes dans le lointain. Le vent des cimes autour de lui est comme un silence grandiose, une caresse descendue de ces hauteurs radieuses dont il a l'intuition. Perdu dans sa mélancolie, il ne sent pas la fatigue. Des ailes l'emportent, son regard doux et effaré plonge dans d'invisibles profondeurs. Il vole plus qu'il ne marche, insensible aux lourdeurs de la pesanteur.

Une lumière l'attend.

Lui aussi attend la lumière. Depuis toujours, depuis un instant, il ne sait plus. Il a tout oublié, sauf le goût de l'infini, la saveur de l'éther, l'appel de l'esprit, l'éclat de la beauté, la vérité de la poésie. Tout s'embrouille en lui, tout s'éclaire aussi. Il chemine, se hâte, monte, trébuche, se relève, reprend sa course folle. L'horizon s'efface, la lumière s'amplifie. L'image se précise.

Il est mort, il est vivant, il est ici, il est là-bas, il est le ciel, les nuages, l'herbe, les rochers, le vent, la poussière. Il se souvient maintenant. Devenu lumière lui-même, il irradie.

Il est mort, enseveli depuis un mois, vivant depuis mille ans, tombé en marchant, mort de lassitude rendu à la poussière, mort en solitaire avec un secret d'amour dans le cœur, un secret inachevé qu'il poursuit sans cesse depuis un siècle, depuis mille ans.

Admin Messages : 320 Date d'inscription : 23/01/2009

Elle est revenue maintenant qu'elle a trouvé la paix.
Seule sans yzalba et Rollin qui l'avaient accompagné dans cette quête macabre.
Elle s'agenouille, le vent se lève...

A présent je suis la mon bien aimé.
Rien que toi et moi, nos deux conscience a nu. Dépouillés de toutes les vanités du monde, nous nous élevons, vers les espaces infinis et purs.
Vivre ou mourir, je me pose la question depuis que tu es parti, mais c'est chose égale car nous sommes unis et rien ne peut nous séparer.
La mort viendra, demain ou dans une décennie, me donner son baiser de givre libérateur, afin que moi aussi, je parle la langue des ancêtres et reprenne avec toi le cours de nostre causerie d'amour, un bref instant interrompue.

Non je ne suis pas folle, je sais que tu m'entends. C'est mon ouïe qui n'est pas au diapason, et qui ne perçois pas encore les subtils pulsations de la nuit ou tu m'attend couché.

Le terme du voyage viendra, mais tant qu'il reste une once d'éveil je veux penser a toi, jusqu'à ce que mon souffle s'arrête.
Ainsi le transfert de mon âme se fera sans heurt ni aspérité jusqu'à toi comme une coulée d'eau claire. Permets moy de venir te retrouver icy et te parler, accorde moy le privilège de croire que tu es encore la proche de moy, que nos âmes ne font qu'une...

J'aime a penser qu'il n'y a pas de regrets a avoir, mais tu m'a privé du charme de nos conversations, et de la douceur d'un amour que je n'attendais pas, et je t'en veux malgré tout.

Si tu m'entends, me vois tu Chevalier?
Ta tante n'a pas voulu de ton épée, elle est testue.
Dois je te la ramenée?

Je te vois rire de mes enfantillages a te parler comme si tu étais cachés derrière l'arbrisseau derrière cette tombe de pierres, que nous avons construite de nos mains.
J'aimerais que tu reviennes alors que c'est impossible, crois tu que c'est facile de vivre sans toi?
Tu me hantes et peuple mes rêves de secrets d'ailleurs, d'amour et de poésie.
Mon corps est meurtrit et se fane de ne plus être aimé, mon âme s'étiole de ne plus jongler avec les mots, car sans toi tout est vide.

Lisyane se lève et frappe violemment d'un coup de pied dans le tas de pierres.

Tiens prends ça...

Admin Messages : 7 Date d'inscription : 26/04/2009 Localisation : Courmayeur ?

Je n'entends pas. Tu es là, recueillie auprès de ma dépouille enterrée dans cette terre rocailleuse. L'odeur de l'été embaume encore les lieux. Tes larmes claires se répandent sur la terre et silence des alpages est la musique mortuaire de ce deuil et ton chagrin, infini mais pudique, est l'hymne que tu me dédies.

Mon corps étendu là-dessous nargue ton inutile amour. Cet amour impuissant à me faire revenir à la vie. Je ne t'entends pas mais je sais que tu es là, questionnant en vain ce cadavre glacé, pétrifié. Oui, c'est mon corps, mon cadavre, ma dépouille. Je suis là, gisant. Sans me plaindre, sans révolte, sans peur, sans plus de haine ni d'amour. Tu cherches sans doute à comprendre, mais il n'y a rien à comprendre. Rien que le fait de ma mort. Je suis effectivement mort, bel et bien mort. Aussi mort que le sont les pierres, les tombes et les ruines. Tu pourras pleurer, prier, défier le Ciel et tous ses anges, rien n'y pourra faire : mon corps s'en ira en poussière et nul ne le verra plus jamais. Il sera déjà sur le chemin d'un irréversible anéantissement.

Tu finiras par comprendre que je suis réellement mort.
Mort.

Mort.

Définitivement.

A tout jamais.