Où l'on prépare la maisonnée...

Messages : 2 Date d'inscription : 01/10/2009

Quand Radyan lui avait fait part de l'ordre de la régente de la retrouver auprès des convois, Mathilde avait senti son cœur faire un bond dans sa poitrine.
Depuis longtemps elle voulait entrer au service de la baronne, mais l'occasion de montrer ses talents ne s'était jamais présentée...

La veille, elle avait rencontré Yzalba au marché. Celle-ci s'adressait aux villageois avec beaucoup d'humanité et de gentillesse et ne prenait personne de haut dans le village, malgré sa charge. Au contraire, la compassion emplissait les beaux yeux gris de la régente, ce qui ne l'empêchait pas de faire montre d'une grande détermination. Mathilde avait tout de suite apprécié la simplicité de la jeune femme qui semblait plus angoissée qu'autre chose par la tâche qui lui était tombée sur les épaules… La paysanne avait vite compris que c'était là l'occasion qu'elle attendait...

Elle avait donc proposé à Yzalba de la guider dans le village et de lui expliquer un peu où en étaient les habitants. Enfin... ce qu'il restait des habitants...

Quand elles s'étaient quittées, Mathilde était certaine qu'un lien s'était créé entre elles et qu'elle aurait bientôt des nouvelles de la régente, ce qui en effet ne tarda pas.

Dès que Radyan eut tourné les talons, elle s'empressa de prendre la route qui menait à la sortie du village. Toutefois, elle s'arrêta très vite et, changeant d'idée, elle se dirigea au pas de course vers la maison de la Baronne. Elle y trouva les trois personnes qui remplissaient à elles seules toutes les fonctions de la maison qui tournait au ralenti en l'absence de la Baronne :

Il y avait d'abord Lydie, la cuisinière, qui s'occupait aussi de l'entretien de la maison. La quarantaine bien sonnée, Lydie arborait en temps normal un air jovial que son embonpoint accentuait. Aujourd'hui, ses yeux avaient gardé leur flamme mais la cuisinière n'avait plus rien à cuisiner, ni pour les autres ni pour elle même... elle avait bien maigri et son énergie l'avait peu à peu désertée, comme tout le monde à Courmayeur...

Venait ensuite dans la hiérarchie tacite de la maison Josette. C'était un petit bout de femme au cœur aussi tendre que son physique était sec. Josette s'occupait des chambres et aidait Lydie pour le ménage. Autant dire que par les temps qui couraient, elle était aussi désœuvrée que la cuisinière...

Enfin, un peu écrasé par la personnalité des deux femmes mais secrètement heureux de son sort, chouchouté par Josette, son épouse depuis quinze ans et Lidye, son amie de toujours, il y avait Ugo, qui s'occupait des extérieurs de la maison et jouait les jardiniers et les hommes à tout faire. De parents italiens, Ugo était habitué à la domination familiale des mammas et laissait les deux femmes régenter sa vie en toute sérénité.

Quand Mathilde déboula dans la cuisine, elle trouva ses trois amis assis à la grande table, les mains inoccupées mais les langues allant bon train. On parlait évidemment de la régente…

…et il paraît qu’elle est pas d’ici ! disait Lydie

Et alors ? répondait Josette. Ce qui compte c’est ce qu’elle est, pas d’où qu'elle vient. Et moi, elle m’a tout l’air d’une brav' femme

Ugo ponctuait le discours des femmes en opinant consciencieusement du bonnet. L’arrivée de Mathilde provoqua une avalanche de questions :

Alors ? Tu l’as rencontrée il paraît ? Comment est-elle ?

Mathilde sourit, entretenant encore un peu le mystère.

Comment elle est ? Et bien… Josette a raison, c’est une brave femme. Elle pense droit, elle comprend nos malheurs et…

Ses yeux pétillaient de joie quand elle lâcha enfin :

Elle m’a fait mander auprès d’elle !! Gardez ma place au chaud, les amis, j’arriiive !! Apparemment les convois sont arrivés, il va y avoir du remue-ménage à la demeure ! Je serais vous, je me mettrais au travail et je préparerais la maisonnée des invités, je pense qu’elle ne va pas rester vide avec tout le beau monde qui est là ! Bon, je file, ELLE m’attend !

Et laissant là ses amis qui s'égayèrent dans la maison comme une volée de moineaux, Mathilde reprit en courant presque la route qui la menait vers Yzalba…